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le blog d'une petite môme de Pigalle
27 janvier 2013

- Qu’est-ce que tu fais là ? J’aurais pu lui

 

- Qu’est-ce que tu fais là ?

J’aurais pu lui répondre un truc du genre c’est une erreur de distribution, le directeur de casting s’est planté, au lieu de quoi j’ai tenté un peu convaincant « j’ai toujours aimé jouer à la marchande, tu ne savais pas ? »

J’essayais de crâner mais j’étais folle de rage de m’être laissée surprendre. Nous avons parlé un moment, puis il a fini par s’en aller, dans un lent travelling au milieu des grille-pain et des aspirateurs.

Il faut dire que quand j’ai connu Patrick en 68, la France se remettait lentement de son mois de mai historique mais pour moi, les choses allaient plutôt bien. Nous nous croisions de temps en temps sur un plateau de doublage, mais j’étais le plus souvent sur scène avec Poiret et Serrault, au Crazy Horse ou en meneuse de revue strassée et emplumée. À cette époque, je n’avais pas encore exploité tous les usages que l’on peut faire d’une plume. Je découvrirais bien plus tard que le strip-tease de l’âme est un exercice autrement coton que celui du corps.

Je voyais souvent Sotha, que j’ai connue bien avant qu’elle ne fonde le Café de la gare avec Romain Bouteille, Coluche, et bien sûr Patrick Dewaere, lorsque je prenais des cours avec Raymond Rouleau à la Communauté Théâtrale.

Un jour, elle me demande en aparté si je pourrais lui rendre un service, sans me dire quoi. Il suffira que je me trouve à 9 heures le lendemain matin à une adresse rue de la Banque, près de la Bourse. Je ne suis pas très chaude sur l’horaire, étant rarement au lit avant trois heures du matin, mais l’amitié, c’est l’amitié.

À 9 heures le lendemain matin, je me retrouve seule devant une mairie. J’ai dû me tromper d’adresse. Je vérifie. Non, c’est bien là. J’attends un peu, en essayant de garder les yeux ouverts. Du bout de la rue, une silhouette connue vient vers moi. C’est l’ami Rufus, l’air aussi réveillé que moi. On se fait la bise, on se pose des tas de questions sur cette convocation matinale. Une blague, peut-être ? À lui non plus, on n’a rien dit.

Finalement, Patrick Dewaere et Sotha arrivent sans se presser, main dans la main. Là, il a bien fallu nous expliquer. Ils allaient se marier et nous avaient choisis comme témoins. J’étais très émue que cette amie de longue date ait fait appel à moi pour cette grande occasion mais j’étais surtout étonnée. Se marier en 68 était totalement incongru, presque une trahison à l’air du temps, d’ailleurs, ils avaient l’air vaguement gênés. Elle a tenté plus tard de se justifier en m’avouant que c’était à la suite d’un pari sur les barricades, mais je soupçonne qu’il y avait bien un peu d’amour là-dessous…

L’affaire est rondement menée, et un quart d’heure plus tard, Sotha et Patrick sont mari et femme. En sortant de la mairie, les épousés de frais nous font promettre de garder leur union secrète. Ni leurs proches, ni surtout la presse, ne doivent l’apprendre. Sans aller jusqu’ à échanger une goutte de sang pour sceller le pacte, nous avons juré craché.

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  • Passée avec bonheur de la scène à l'écriture, je raconte ici mon parcours. Comédienne , ex-danseuse au Crazy, romancière , célèbre en Turquie, embarquez avec moi pour un voyage plein d'imprévus. AVIS aux EDITEURS, les droits pour la France sont libres..
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